Remparts et porte Brunet

Le XIIème siècle est une période clef pour Saint-Émilion. D’abord, la région passe sous la tutelle des Anglais suite au mariage d’Aliénor d’Aquitaine et du roi Henri Plantagenêt en 1152 (futur Henri II). Le village devient de plus en plus prospère et l’on parle bel et bien d’un « âge d’or » de la cité lorsqu’on évoque cette période. Le village s’enrichit grâce aux échanges vinicoles avec l’Angleterre, mais surtout grâce au commerce de sa précieuse pierre calcaire.

C’est dans ce contexte, que l’Angleterre aurait recommandé au village de se protéger avec la construction d’un mur de fortification. Ce mur peut être aussi considéré comme un mur d’apparat, dont le but premier aurait été de montrer la puissance du village plus que de le protéger. Toujours est-il qu’il devait être nécessaire de payer une taxe pour entrer dans le village intra-muros, représentant une nouvelle source de richesse.

Les habitants commencèrent par creuser eux-même tout autour du village des fossés profonds. Avec les pierres extraites, ils édifièrent un mur d’enceinte englobant plus de 18 hectares et courant sur environ 1,5 km autour du village. Cette muraille était flanquée de six portes et de petites tours défensives, un chemin de ronde liait ces portes entre elles, et, au XVème siècle, un système de mâchicoulis fût sans doute ajouté.
De ces 6 portes, une seule subsiste, la porte Brunet, à l’est. On trouvait aussi au nord, la porte Bourgeoise; à l'ouest, les portes des Chanoines et de Saint-Martin; au sud, la porte Bouqueyre et la porte Sainte-Marie.
Ces autres portes, ainsi qu’une majorité de l’ancienne fortification, furent détruites en 1538 au cours des guerres de religion, puis, encore au XIXème siècle, avec le percement de la rue Guadet et le désir d’ouvrir la cité à la circulation moderne. Il est toujours possible d’identifier quelques vestiges de ces anciens remparts et de leurs douves, notamment à proximité de l’église collégiale en direction de la porte Saint-Martin par l’avenue du 8 mai 1945.
D’une longueur de 9m50 et d’une largeur de 3m90, on devine encore entre les deux arcs de la porte Brunet un assommoir par lequel les défendeurs jetaient des pierres et de l’eau bouillante sur les assaillants. Les côtés furent élargis au XVIIème siècle pour que les charrettes puissent s’y croiser. Le passage se fermait à l’aide de portes en bois sur gonds toujours visibles de nos jours. Sur le côté se trouve un couloir menant à l’escalier qui permettait de rejoindre le chemin de ronde.
Tirant son nom du Gascon « Branet » signifiant landes, bruyère, clairière, cette porte qui s’ouvrait sur la campagne fut pourtant témoin de beaucoup d’évènements historiques. Fermée à clef en 1605 pour protéger la ville de la peste, elle fut aussi témoin de la fuite des derniers Girondins proscrits qui empruntèrent la porte Brunet avant de connaître une bien triste fin…