Histoire au Fil des rues - Saint-Claude-de-Diray

Ce n’est pas un hasard si le village de St Claude s’est développé sur le coteau. Le « Val » comme on l’appelle ici, a toujours proposé une terre riche en alluvions, et propice aux cultures. On imagine mal la Loire envahir ce vaste paysage : ce fut pourtant le cas lors des grandes crues du 19ème siècle (1846, 1856 et 1866). Celle de 1856 arriva à la hauteur de la borne ci-dessous. En 1883, les Ponts et Chaussées procèdent au renforcement de la levée. C’est à partir de 1850 que le Bac de Ménars est mis en place et ses « voituriers par eau » facilitent les échanges entre les 2 rives jusqu’à Bracieux, marché influent et canton de rattachement de St Claude à l’époque. La mise en service de la ligne ferroviaire Blois-Romorantin, y mettra fin rapidement.

Si la vigne a toujours été présente à St Claude, l’asperge fut introduite au 19ème siècle par Charles Depezé. C’est l’asperge de « Vineuil – St Claude » qui fera la renommée du Loir-et-Cher, avec un premier label de qualité créé en 1912. A peu près à la même époque (1890-1895) apparaissent les premiers plants d’ignames sur la commune. Mais il faut attendre les années 1960, et le travail de sélection rigoureuse opérée par M. Claude Robert, habitant de la commune, avant d’obtenir un tubercule plus court. Cette culture peu répandue sous nos latitudes, fait de St Claude la capitale européenne de l’igname, emblème de la commune qui lui dédie sa fête annuelle à la Quasimodo (dimanche après Pâques). Le village connaît plusieurs autres initiatives de cultures originales.

Sur l’ensemble de la commune, on dénombre pas moins d’une quarantaine de puits, qui relèvent suivant le cas du domaine public ou privé. Il s’agit, pour certains, de puits de quartier caractérisés par leur forme cylindrique surmontée d’une demi sphère en maçonnerie de pierre de calcaire, à l’identique des murs qui bordent les rues du village. La construction des plus anciens date du 17ème siècle. Généralement d’une profondeur de 10 à 15 mètres, la plupart ne fonctionnent plus, par insuffisance d’eau à ce niveau de la nappe. Sur le bord des routes, vous pouvez en admirer une quinzaine parfois recouverts de leur dôme typique de la région. L’un d’entre eux possède même toujours sa pompe !

Que d’histoire derrière les murs d’enceinte du château de Nozieux, bâti par Jehan Charon vers 1640. A l’époque le hameau de Nozieux appartenait à la commune de Montlivault, et son rattachement à St Claude fût décidé par Louis XIV en 1660, les habitants se plaignant de ne pas entendre les cloches. Le château restera dans la famille Charon avant d’être acheté par Mme de Pompadour, qui résidait au château de Ménars juste en face de l’autre côté de la Loire. En 1901, il devient la « Pouponnette de Notre Dame de la victoire », sorte de pensionnat réservé aux très jeunes enfants, avant de devenir la maison de retraite de la « Croix Verte » dédiée aux militaires coloniaux. Puis suite à un incendie, il sera démoli en 1910-1911.

Si le hameau de Nozieux se tient à l’écart des grands axes de circulation, cela n’a pas toujours été le cas. C’est en effet sous l’impulsion de Louis XI (15ème) que les relais de Postes se développent en France. Celui de Nozieux (15 et 16ème) se situe alors sur la route de Blois à Orléans que l’on aperçoit sur ce plan cadastral de 1809 encore utilisé jusqu’en 1974. D’illustres personnages sont passés ici comme Jeanne d’Arc, D’Artagnan, Jean de la Fontaine ou encore Louis XI en chemin vers sa dernière demeure à Cléry-Saint-André. Au début du 20ème siècle, le relais de Poste a repris sa vocation première en accueillant des voyageurs qui en grande majorité ont troqué leur monture pour un moyen de transport plus moderne.

La « Rue Barrée » : une rue pas comme les autres. Plus qu’un lieu de passage c’est avant tout un lieu de vie. D’après l’histoire locale, elle tire son nom d’une coutume qui consistait une fois par an à barrer la rue pour y faire la fête : ses habitants auraient-ils inventé la « fête des voisins » avant l’heure ? Tout porte à penser que dans ce hameau bien vivant du village de St Claude, rien n’est tout à fait comme ailleurs et que l’esprit de quartier y est  plus que développé. Il existe même l’équivalent d’un comité des fêtes propre au quartier : la « Fraternelle de Morest ». Son mode de fonctionnement est inchangé depuis sa création au début du 20ème siècle : il faut impérativement être un habitant de Morest pour y adhérer.

Retrouver le lieu d’implantation des anciens commerces du village n’est pas chose facile. Pourtant en 1920, il y avait près de 60 commerçants et artisans bien répartis sur toute la commune. A noter qu’aucun des commerces actuels ne se situe à l’emplacement de l’un d’entre eux. Le bâti ancien est cependant toujours présent, mais l’activité s’est déplacée vers le nouveau centre du village. A l’époque il y avait 3 boucheries, 2 courtiers en vin, 3 charrons, 1 tisserand, 1 tailleur pour homme, une vinaigrerie,… et pas moins de 5 cafés comme celui de la Bonne-Dame, qui fait référence à la statuette de la vierge juchée au-dessus de la devanture de la maison d’à côté. Avant d’être un café, c’était une salle de réunion pendant la Révolution.

Bien qu’il en existe plusieurs en plein cœur de la commune, il ne s’agit pas d’un nouveau mode d’habitation. Cette construction en bois offre pourtant de très beaux volumes, mais son aménagement intérieur reste assez sommaire pour y vivre à l’année. Le système de ventilation naturelle basé sur des panneaux à lattes a largement fait ses preuves, et régule tant l’hygrométrie que la température intérieure. Non, en réalité c’est un ancien séchoir à tabac, témoin d’une activité importante de la région débutée après la 1ère guerre mondiale, avant de péricliter dans les années 1980. La culture était si encadrée par l’administration que certains producteurs se souviennent avoir planté 10 pieds de tabac de trop et se voir obligés de les arracher.

Peu de traces subsistent sur St Claude de cette étonnante initiative du début 19ème. C’est  vers 1897 que plusieurs communes de la rive gauche commencent à imaginer ce projet de tramway électrique pour aller d’Amboise à Cléry-Saint-André. Il faudra plus de 10 ans pour le concrétiser, puis 4 ans de travaux avant l’ouverture de la ligne en 1913-1914. Les motivations sont surtout économiques et visent à favoriser la commercialisation des productions locales de vins, d’asperges et de pommes de terre. Curieusement, c’est le pétrole, par la mise en place d’un service d’autobus entre Blois et Beaugency, et l’essor des véhicules motorisés qui fera péricliter ce mode de transport, jusqu’à son arrêt en 1934. Difficile aujourd’hui d’imaginer que cette ligne qui desservait Les Noëls pour rejoindre Montlivault, passait ici.

L’église de St Claude est sans doute l’un des bâtiments de la commune qui a le plus évolué. Il faut savoir qu’avant de prendre place ici, elle se situait dans le val en bord de Loire, jusqu’en 1529 où elle fut détruite par une inondation. Le siège de la paroisse fut alors transporté à la chapelle « St Claude de Mivensay » bâtie en 895 à l’emplacement de l’église actuelle. Puis entre 1540 et 1550, elle fut agrandie. C’est en 1791 que les fonds baptismaux, classés Monument historique, furent achetés au district révolutionnaire. Plus récemment au début des années 60, le chœur de l’église, encore visible sur les photos, a été abattu pour faciliter la circulation rue de la Loire.