Nous vous invitons à découvrir un Pays d’Aix où l’eau est déviée, conduite pour répandre la vie.
A Bouc-Bel-Air, vous admirerez la transformation éclatante d’une source en un jardin « remarquable » du XVIIe siècle ponctué de bassins étagés, jets d’eau et fontaines. A Cabriès, le Lac bleu, bassin de décantation du canal de Montricher invite à la balade et surprend par sa richesse ornithologique. Une partie de son eau fut dirigée vers Calas, alimentant lavoir et bornes-fontaines ; sa déverse est à l’origine d’une source (l’Infernet) qui vous mènera à Vitrolles, pour une balade incontournable dans le silence des sous-bois. Aux Pennes-Mirabeau, la fontaine et son lavoir marquent l’aboutissement des travaux du marquis Vento pour amener l’eau au village. Le majestueux aqueduc de Roquefavour, le plus grand ouvrage en pierre au monde, vous incitera à randonner et à bénéficier d’une vue incroyable. De retour sur Aix, ne manquez pas Saint-Pons et son joli pont classé, jeté sur un méandre de l’Arc.
Après une dure sécheresse tarissant sources et puits marseillais en 1834, entraînant à son tour une effroyable épidémie de choléra, le Conseil municipal de Maximin Consolat, décide « quoiqu’il advienne et quoiqu’il en coûte » de faire construire le canal d’adduction nécessaire à la bonne alimentation en eau de Marseille. Le projet n’est pas nouveau et fait figure « d’arlésienne », sa nécessité étant reconnue depuis plusieurs siècles, mais devant l’ampleur du programme n’avait jamais été voté. Adam de Craponne, déjà en 1558 avait proposé un canal captant l’eau de la Durance, un peu en aval du pont de Mirabeau, en passant par Aix. Mais cette fois, la volonté politique est manifeste et est entérinée par un engagement fort, pris le 18 juillet 1834 : « L'exécution du canal est une décision irrévocable. »
Après plusieurs années d'études préparatoires, le projet présenté par Frantz Mayor de Montricher est adopté : la conception et la réalisation du canal destiné à amener l'eau de la Durance à Marseille, entreprise et chantier gigantesques sont entre les mains d’un jeune homme de seulement 28 ans. Polytechnicien, ingénieur sorti major de l’école des Ponts et Chaussées, Montricher s’avère très vite être l’homme, exceptionnel, que l’ampleur du projet exige. Il fut comparé à l’époque, à Napoléon, à un général, pacifique certes, mais remportant victoires sur victoires face à une nature hostile, à la tête d’une armée d’entrepreneurs, d’ouvriers, de manoeuvres, de maçons, de charpentiers, de tailleurs de pierres… 1 000 ouvriers affectés en permanence à la construction du canal et un effectif global qui aurait même atteint 7 000 à 8 000 personnes en avril 1848. Combatif, exigeant, autoritaire mais humain et généreux Montricher était admiré et respecté et avait en outre des pensées sociales, en prenant la défense de la classe ouvrière. Décédé en Italie, alors qu’il asséchait un lac, son corps fut rapatrié à Marseille et l’arrivée de sa dépouille fut accueillie par une foule immense, tenant à rendre hommage à ce grand bienfaiteur, qui fut de son vivant, décoré de la légion d’honneur par le prince-président Louis-Napoléon Bonaparte, au pied de son aqueduc de Roquefavour. Certains journalistes relatant ses obsèques écrivirent même que tout Marseille y assistait ; le maire de Marseille, parla dans son éloge funèbre de « malheur public » et de « deuil général ».